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Arguments en faveur de l’industrie canadienne de l’acier

24 juin 2016

L’industrie de l’acier a sans doute constitué le vecteur de développement des économies industrialisées de l’Amérique du Nord. La première société multimilliardaire à voir le jour a été U.S. Steel, en 1901. Au milieu des années 1900, l’économie industrielle nord-américaine reposait sur deux piliers essentiels : la fabrication de l’acier et la fabrication d’automobiles. Cependant, les temps ont changé. L’industrie canadienne de l’acier est menacée par le commerce déloyal que pratiquent des pays comme la Chine, la Turquie et la Corée du Sud, et elle ne reçoit que peu, voire aucun, soutien du gouvernement du Canada. De ce fait, deux des plus grandes aciéries au pays ont demandé la protection contre leurs créanciers, quelque 1500 travailleuses et travailleurs ont été mis à pied au cours de la dernière année et des milliers de retraités ont perdu leurs prestations pour soins de santé parce que les entreprises tentent de refiler leurs pertes à la main-d’œuvre. Pourtant, comme le démontrera le présent document, il est clairement dans l’intérêt économique, social et environnemental du Canada d’appuyer son industrie sidérurgique.

L’industrie canadienne de l’acier procure d’innombrables avantages économiques au pays. Elle emploie environ 22 000 personnes, et chaque poste en soutient indirectement un minimum de trois autres. L’Association canadienne des producteurs d’acier estime à 70 000 $ par année le salaire annuel moyen dans l’industriev. Le secteur injecte donc 1,7 milliard de dollars dans la masse salariale du Canada. L’importance de ces emplois sur le plan économique est particulièrement évidente parce que ces salaires permettent aux travailleurs de stimuler les économies des petites municipalités où ils vivent et travaillent. À cette capacité accrue de dépenser se conjugue une capacité accrue de payer plus d’impôts. Ces impôts permettent à notre gouvernement de construire les écoles, les ponts et les routes dont nous avons besoin. Il est indispensable de protéger cette assiette fiscale partout au pays, et peut-être encore davantage en Alberta, où résident des centaines de Métallos. Depuis 2015, l’Alberta a vu ses revenus provinciaux diminuer de plus de huit milliards en raison de l’effondrement des prix du pétrole. L’importance du secteur de l’acier sur le plan économique est clairement évidente.

L’acier fabriqué au Canada, dont l’empreinte écologique équivaut à une fraction de celle de l’acier provenant de l’étranger, procure d’innombrables avantages. Les fabricants canadiens respectent des normes environnementales strictes. Le gouvernement de l’Ontario a récemment publié son plan de lutte contre le changement climatique de sept milliards de dollars, lequel entraînera de nombreuses conséquences pour les fabricants de la province. En Alberta, la première ministre Rachel Notley a annoncé récemment le plan de sa province visant à éliminer graduellement les centrales thermiques alimentées au charbon (une importante source d’énergie pour les fabricants d’acier albertains) et à les remplacer par des centrales d’énergies renouvelables et au gaz naturel. Par conséquent, grâce à des sources d’énergie aussi propres, l’empreinte carbonique de l’acier fabriqué au Canada est de deux à quatre fois moins élevée que celle de nos concurrents internationaux. En revanche, l’industrie sidérurgique de la Chine émet à elle seule 50% du gaz carbonique produit dans le monde. Elle constitue également la source d’émission du quart des matières particulaires que l’on retrouve dans l’air des villes de la côte ouest. Approvisionner le marché canadien en acier fabriqué ici au pays est non seulement logique sur le plan économique, mais aussi responsable sur le plan environnemental.

Malheureusement, le contraire s’est produit. En 2014, grâce à des subventions gouvernementales, la Chine (le plus important producteur d’acier au monde) a expédié 100 millions de tonnes d’acier à l’étranger, dont 552 535 tonnes au Canada. De ce nombre, 138 893 tonnes de barres d’armature avaient fait l’objet de dumping, selon l’Agence des services frontaliers du Canada. Le dumping se définit comme l’exportation d’un produit vendu sur le marché étranger à un prix inférieur à celui du marché national. La Chine est le pays qui contribue le plus à la surcapacité actuelle d’acier dans le monde. Conséquemment, au cours de la dernière année, les prix de l’acier à l’échelle internationale ont chuté à des niveaux jamais vus depuis le ralentissement de l’industrie en 2011. À ce moment-là, Stelco (maintenant U.S. Steel Canada) s’est retrouvée au bord de la faillite quand les importations bon marché ont acquis une part de marché de 44%, faisant chuter les profits de 96% dans une seule année.

Comment et pourquoi les fabricants d’acier chinois agissent-ils ainsi? Ils bénéficient de la manipulation par le gouvernement communiste du yuan chinois lequel, le 11 août 2015, a connu la plus importante perte de valeur en un peu plus d’une décennie. La situation s’est produite après la publication des données sur le commerce révélant que les exportations de la Chine avaient diminué d’environ 8%. La valeur du yuan se maintient près de celle du dollar américain et, en dévaluant artificiellement le yuan, le gouvernement veille à ce que les exportations d’acier chinois se vendent moins cher sur le marché international. De plus, pour certaines des plus importantes aciéries appartenant à l’État chinois, il est impératif de maintenir l’emploi, non pas d’adhérer à la conjoncture. Ces entreprises publiques ont accès à des fonds gouvernementaux considérables et sont donc en mesure de maintenir des taux de production élevés malgré la faible demande intérieure et internationale. Cette surcapacité a mené les fabricants chinois à pratiquer le dumping de produits d’acier au Canada, exerçant ainsi des pressions à la baisse inéquitables sur les producteurs canadiens; en fait, les producteurs d’acier de la Chine exportent leur indifférence à l’égard de salaires équitables et des droits des travailleurs. Les faibles salaires en Chine, que nous croyons équivaloir à environ 4,50 $ CAN l’heure, ainsi que l’indifférence dont elle fait preuve envers la santé et la sécurité de sa population ouvrière, permettent aux fabricants chinois de réaliser des économies de 41% comparativement aux fabricants américains. Les travailleurs de l’acier au Canada ne peuvent les concurrencer, et ils ne devraient pas avoir à le faire.

Face à cette situation, l’industrie canadienne de l’acier a reçu peu, voire aucun, soutien des gouvernements fédéral et provinciaux. En 2015, le gouvernement libéral de droite de la Colombie-Britannique (C.-B.) a fait valoir devant le Tribunal canadien du commerce extérieur qu’il était dans «l’intérêt public» qu’on lui accorde une exemption afin qu’il puisse utiliser les dollars des contribuables de la province pour acheter des barres d’armature bon marché provenant de la Chine, même si des Métallos canadiens dans la province voisine de l’Alberta fabriquaient exactement le même produit. Au palier fédéral, il est interdit aux syndicats canadiens d’entamer des poursuites commerciales contre les pays qui écoulent de l’acier à bas prix sur les marchés canadiens. De plus, le budget fédéral publié récemment, qui prévoit des milliards de dollars de dépenses dans l’infrastructure, ne mentionne aucunement si le gouvernement se procurera de l’acier fabriqué au pays. Il est clair que l’industrie n’a bénéficié d’aucun appui gouvernemental.

Comme le démontre le présent document, il est dans l’intérêt économique, environnemental et social du Canada de maintenir une industrie de l’acier solide au Canada. Non seulement fournit-elle des emplois rémunérateurs à plus de 22 000 Canadiennes et Canadiens, mais elle assure la subsistance de 100 000 autres, et ce, moyennant une fraction de l’empreinte écologique des producteurs étrangers. Pourtant, l’industrie est menacée et ne reçoit que peu, voire aucun, soutien de nos gouvernements. Il en a résulté des pertes de millions de dollars et de milliers d’emplois. Sans l’appui clair et décisif des intervenants du secteur de l’acier, les pertes continueront de s’accumuler. La question qui se pose maintenant est de savoir pendant encore combien de temps l’industrie peut-elle tenir le coup.

 

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