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Dossier juridique Westray

juin 23, 2022

Responsabilité criminelle des entreprises 2004-2022

Un examen des cas juridiques depuis l’adoption des modifications Westray au Code criminel du Canada

Sommaire

Les modifications apportées en 2004 au Code criminel du Canada visant à faciliter l’imposition d’une responsabilité criminelle aux entreprises lorsque des blessures et accidents mortels se produisent dans les lieux de travail sont largement sous-utilisées. Jusqu’à ce jour, il y a eu seulement neuf poursuites fructueuses aux termes des modifications Westray. Les peines imposées dans le cadre de ces poursuites ont été dérisoires. Les blessures graves et accidents mortels continuent de se produire à un rythme alarmant dans les lieux de travail.

Les gouvernements peuvent prendre des mesures concrètes qui permettront de mieux appliquer les modifications Westray afin de tenir les entreprises responsables de leurs actes de négligence criminelle.

Le désastre à la mine Westray

En 1992, 26 mineurs à la mine Westray, dans le comté de Pictou en Nouvelle-Écosse, ont perdu la vie dans une explosion résultant d’une accumulation de méthane et de poussière de charbon. Les corps de seulement quinze mineurs ont été retrouvés.

Le gouvernement de la Nouvelle-Écosse a demandé une enquête publique sur les causes du désastre. Le juge K. Peter Richard a présidé l’enquête publique et entendu des témoignages pendant 76 jours.

Le juge Richard a conclu que les explosions et la mort des travailleurs découlaient d’une combinaison de négligence et de mauvaise gestion de la part de l’entreprise, ainsi que du cafouillage et de l’indifférence du gouvernement. Voici ses principales constatations :

  • Le système de responsabilité interne de la mine en matière de santé et de sécurité a échoué.
  • Les cadres de la mine ont fait preuve d’un flagrant mépris à l’égard des règlements sur la santé et la sécurité.
  • Les cadres de la mine ont intimidé les mineurs et usé de coercition à leur égard par voie de menaces et de congédiements.
  • La direction de la mine a donné la priorité à la production aux dépens de la sécurité.
  • Les inspecteurs et les représentants gouvernementaux ne se sont pas acquittés de leurs responsabilités en matière de surveillance.

Le juge Richard a présenté plus de 70 recommandations visant à améliorer la santé et la sécurité des travailleurs, y compris une recommandation au gouvernement du Canada de modifier le Code criminel afin de veiller à ce que les entreprises et leurs cadres dirigeants soient tenus responsables de la sécurité dans le lieu de travail.

Les modifications Westray au Code criminel du Canada

Aucune personne ni entreprise n’a jamais fait l’objet de poursuites judiciaires menant à des accusations à la suite du décès des travailleurs de la mine Westray. À l’époque, aux termes du Code criminel, il était difficile de tenir les entreprises et leurs cadres dirigeants criminellement responsables des blessures graves et des accidents mortels dans le lieu de travail.

Pendant plus d’une décennie, les survivants des familles et le mouvement ouvrier, plus particulièrement le Syndicat des Métallos, ont exercé des pressions sur le gouvernement fédéral et les membres du Parlement pour que le Code criminel soit modifié de façon à ce qu’il soit plus facile de tenir les entreprises et leurs cadres dirigeants responsables des blessures graves et des accidents mortels dans le lieu de travail.

En 2004, le Parlement fédéral a adopté à l’unanimité les modifications Westray au Code criminel, modifications qui portaient principalement sur l’infraction de négligence criminelle.

Les modifications Westray font en sorte qu’il soit plus facile de tenir les entreprises responsables de négligence criminelle en :

  • Créant une nouvelle obligation légale (art. 217.1) selon laquelle toutes les personnes à qui il incombe de diriger l’accomplissement d’un travail ou l’exécution d’une tâche ou qui sont habilitées à le faire doivent prendre les mesures voulues pour éviter qu’il n’en résulte des blessures corporelles pour autrui.
  • En créant des règles (art. 22.1) pour attribuer aux entreprises la responsabilité à l’égard des actions de leurs agents qui sont criminellement négligents.

En résumé, si une personne qui a le devoir de prendre toutes les mesures raisonnables pour éviter des blessures corporelles à un travailleur omet de le faire, et ce faisant agit avec une insouciance déréglée ou téméraire à l’égard de la vie et de la sécurité du travailleur, cette personne est coupable de négligence criminelle (art. 217.1).

Si un ou plusieurs agents d’une entreprise commettent une infraction de négligence criminelle et qu’un cadre supérieur (ou des dirigeants) de l’entreprise s’écarte de façon marquée de la norme de diligence qu’il aurait été raisonnable d’adopter pour empêcher l’agent de commettre l’infraction de négligence criminelle, l’entreprise peut alors être reconnue coupable de négligence criminelle (art. 22.1).

Voici les peines liées à une condamnation pour une infraction de négligence criminelle susceptible de poursuite en justice aux termes des modifications Westray :

Personnes

  • Blessures découlant de négligence criminelle : 10 ans d’emprisonnement
  • Décès résultant de négligence criminelle : emprisonnement à perpétuité
  • Amende sans limite et suramende compensatoire de 30%

Entreprises

  • Casier judiciaire
  • Probation
  • Amende sans limite et suramende compensatoire de 30%

Application des modifications Westray

De 2004 à 2013, les modifications Westray au Code criminel ont servi dans seulement 23 poursuites visant à porter des accusations de négligence criminelle dans des cas de blessures graves ou de décès de travailleurs. Sur ces 23 causes, 13 entreprises et 17 personnes ont fait l’objet d’accusations de négligence criminelle.

Depuis le début de 2022, seulement neuf poursuites ont abouti aux termes des modifications Westray : quatre au Québec, quatre en Ontario et une en Colombie-Britannique. Ces poursuites ont mené à la condamnation de sept entreprises et de deux personnes. Les peines ont été relativement légères.

  • R c. Transpavé – un employé d’un fabricant de produits de béton est mort écrasé; système de protection désactivé; aucun système d’inspection; formation en sécurité inadéquate.

Peine : amende de 110 000 $, plus suramende compensatoire de 10 000 $.

  • R c. Scrocca – un employé d’un entrepreneur paysagiste est mort écrasé par une pelle rétrocaveuse; omission de maintenir de multiples systèmes de freinage.

Peine : 2 ans moins un jour, à servir dans la collectivité, sous réserve de conditions, notamment d’heures de rentrée.

  • R c. Metron – Quatre employés ont perdu la vie et un autre a subi des blessures graves à la suite de l’effondrement d’un échafaudage volant défectueux; les employés n’utilisaient pas de cordages de sécurité.

Peine initiale au premier procès : amende de 200 000 $, plus une suramende compensatoire de 30 000 $.

Peine à l’appel : amende de 750 000 $, plus suramende compensatoire de 112 500 $.

  • R c. Kazenelson – Gestionnaire de projets personnellement inculpé des décès et des blessures des employés de Metron.

Peine : 3,5 ans d’emprisonnement pour chacun des cinq chefs d’accusation à purger simultanément : condamnation et peine confirmées en appel.

  • R c. Detour Gold Corp – Un employé de la société Gold Mining Inc. est mort d’intoxication aiguë au cyanure : aucun équipement de protection ni fournitures médicales, aucun personnel médical adéquatement formé.

Peine : amende de 1 400 000 $, suramende compensatoire de 420 000 $, plus dédommagement de 805 333 $.

  • R c. Stave Lake Quarries – Une employée est morte écrasée par le transporteur de roches qu’elle conduisait; aucune formation ou supervision adéquate, aucune cale de roue.

Peine : amende de 100 000 $, plus suramende compensatoire de 15 000 $.

  • R c. Century Mining Corp – Un employé de la société minière a perdu la vue et subi de graves blessures lorsqu’il a été écrasé par un camion.

Peine : amende 200 000 $; l’employeur a déclaré faillite; amende non recouvrable.

  • R c. CFG Construction – Un employé de l’entreprise de construction perd le contrôle de son camion; système de freinage défectueux dû au mauvais entretien du véhicule.

Peine : amende de 300 000 $, plus une ordonnance de probation de trois ans.

  • R c. Rainbow Concrete – Un employé d’une entreprise de construction conduisait un camion à benne lorsqu’une structure sur la propriété de l’entreprise est tombée sur le camion, écrasant l’employé.

Peine : amende de 1 000 $, plus suramende compensatoire de 200 000 $.

Dans cinq cas, les accusations ont été retirées; dans quatre cas, il y a eu plaidoyer de non-culpabilité par suite du procès; dans trois autres, il y a eu arrêt des procédures par la Couronne, y compris une accusation portée à la suite d’une poursuite privée que le Syndicat des Métallos a engagée; deux accusations contre deux personnes et une accusation contre une entreprise sont en suspens.

Des sommaires plus détaillés sur ces causes se trouvent à l’annexe «A» du présent rapport.

Les accidents mortels au travail se produisent toujours à un rythme alarmant au Canada

Au Canada, de 900 à 1 000 travailleurs perdent la vie au travail chaque année.

  • 1993 à 2019 : 24 519 décès au travail (moyenne de 943 décès de travailleurs chaque année)

* Source : Association des commissions des accidents du travail du Canada

Selon les données de l’Association des commissions des accidents du travail du Canada, 925 travailleuses et travailleurs ont perdu la vie de causes liées au travail en 2019 et 1 027 en 2018. Les données pour 2020 seront publiées plus tard en 2022.

Pour des renseignements supplémentaires concernant les statistiques sur les accidents mortels dans les lieux de travail au Canada et les comparaisons à l’échelle des provinces et territoires, veuillez consulter le document intitulé 2021 Report on Work Fatality and Injury Rates in Canada que Sean Tucker et Anya Keefe de l’Université de Regina ont préparé.

Raisons pour lesquelles les modifications Westray ne sont pas utilisées davantage

Principales raisons de la sous-utilisation des modifications Westray :

  • Les corps policiers, les procureurs de la Couronne et les organismes provinciaux de réglementation de la santé et de la sécurité n’ont pas véritablement pris conscience des conséquences et de la portée criminelle des blessures graves et décès au travail. On croit de manière générale que les blessures graves et les décès au travail sont des questions qui nécessitent une réaction de la part des organismes de réglementation provinciaux et non une sanction pénale. L’évolution de la pensée concernant le besoin d’entamer des poursuites contre les délits de conduite avec facultés affaiblies et la violence familiale démontre un important parallèle.
  • Les corps policiers et les procureurs de la Couronne manquent de connaissances, d’éducation, de formation et de ressources dans l’utilisation des modifications Westray.
  • Il existe un manque de coopération et de coordination entre les organismes de réglementation de la santé et de la sécurité, les corps policiers et les procureurs de la Couronne en matière d’enquêtes sur les blessures graves et les décès au travail.
  • Les gouvernements et les employeurs continuent de promouvoir un programme de déréglementation qui affaiblit le désir et les moyens de tenir les entreprises responsables de leurs actes de négligence criminelle entraînant des blessures graves et des décès au travail.

Quelles mesures doit‑on prendre pour garantir une meilleure application des modifications Westray?

  • Les organismes de réglementation de la santé et de la sécurité, les corps policiers et les procureurs de la Couronne ont besoin d’information et de formation en ce qui a trait aux modifications Westray et à leur application.
  • Les procureurs généraux doivent restreindre le pouvoir discrétionnaire des procureurs de la Couronne de ne pas entamer de poursuites pour négligence criminelle dans le cas de blessures graves et de décès au travail.
  • Il faut des procureurs de la Couronne désignés pour entamer des poursuites pénales dans les cas de blessures graves et de décès au travail.
  • Les corps policiers devraient être tenus de mener des enquêtes dans tous les cas de blessures graves et de décès au travail.
  • Les corps policiers ont besoin d’information et de formation pour mener des enquêtes sur les accidents au travail.
  • Il faut enjoindre les organismes de réglementation de la santé et de la sécurité de faire appel aux corps policiers lorsque des accusations peuvent s’imposer aux termes des modifications Westray.
  • Il faut établir un protocole écrit pour coordonner les efforts des organismes de réglementation de la santé et de la sécurité, des corps policiers et des procureurs de la Couronne dans le traitement des cas de blessures graves et de décès au travail.
  • Des équipes désignées et coordonnées comprenant des représentants des organismes de réglementation de la santé et de la sécurité, des corps policiers et des procureurs de la Couronne devraient travailler à l’application des modifications Westray.
  • Il faut fournir des ressources financières accrues aux corps policiers et aux procureurs de la Couronne afin d’aider à garantir une application adéquate des modifications Westray.

En cours

  • R c. Gooch [procès prévu en mai 2022]
  • R c. Springhill Construction Ltd. [procès prévu en juin 2022]

Condamnations/Plaidoyers de culpabilité

  • R c. CFG Construction [2019]
  • R c. Rainbow Concrete [2019]
  • R c. Century Mining Corp [2017]
  • R c. Detour Gold Corporation [2017]
  • R c. Stave Lake Quarries Inc. [2016]
  • R c. Kazenelson [2015]
  • R c. Metron [2012]
  • R c. Scrocca [2010]
  • R c. Transpavé Inc. [2008]

Acquittements

  • R c. Hoyeck [2019]
  • R c. Ressources Métanor [2017]
  • R c. Gagné et Lemieux [2010]
  • R c. Ontario Power Generation, Tammadge et Bednarek [2006]

Accusations suspendues

  • R c. Peter Kiewit Sons ULC [2021]
  • R c. Fournier, 2018 QCCQ 1071
  • Métallos c. Weyerhaeuser [2011]

Retraits

Résumés des causes – En cours

R c. Gooch

En mars 2018, Brandon Alcorn est mort après être tombé d’un toit à un chantier de construction.

En 2019, Jeff Scott Gooch, un directeur chez Insulated Panel Structures en Nouvelle-Écosse, a été accusé de négligence criminelle causant la mort. Même si l’entreprise a été accusée aux termes de la législation sur la santé et la sécurité au travail, elle ne l’a pas été aux termes du Code criminel.

Jeff Scott Gooch a été congédié en avril 2021 à la suite d’une enquête préliminaire devant un tribunal provincial à Darmouth. En juin 2021, la Couronne a subséquemment déposé une mise en accusation directe pour relancer l’accusation et a saisi la Cour suprême de la Nouvelle-Écosse de cette affaire.

Un procès d’une durée de cinq jours doit commencer le 9 mai 2022.

R c. Springhill Construction Ltd.

En juillet 2020, Springhill Construction Ltd., et un ancien superviseur, Jason King, 43 ans, ont tous deux été accusés de négligence criminelle causant la mort par suite du décès du jeune Michael Anthony Henderson de 18 ans en août 2018 à des installations de traitement des eaux usées.

C’était la première fois que des accusations étaient portées aux termes de l’article 217.1 du Code criminel au Nouveau-Brunswick.

Springhill Construction Ltd. et Jason King devaient comparaître devant la Cour provinciale de Fredericton le 29 janvier 2021. L’affaire sera jugée le 3 juin 2022, en raison de la décision d’un juge de la Cour du Banc de la Reine de siéger seul.

Sommaires des causes – Acquittements

R c, Hoyeck, 2019 NSSC 7

  • Décès d’un travailleur à la suite d’une explosion alors qu’il effectuait l’entretien d’une voiture; l’employeur a été accusé de négligence criminelle causant la mort; il a été acquitté.

En 2013, Elie Hoyeck, copropriétaire de «Your Mechanic Auto Corner», a demandé à Peter Kempton, un mécanicien automobile, de retirer le réservoir d’essence d’une minifourgonnette. Peter Kempton a utilisé un chalumeau soudeur, et la fourgonnette a pris feu. L’employé est resté coincé sous le véhicule, a été gravement brûlé et est décédé de ses blessures par la suite.

Un expert a examiné les lieux après l’incident et a rapporté que les conditions étaient déplorables. La cour était remplie de bateaux, de voitures, de contenants d’essence et d’huile, et de déchets. Le bassin oculaire servait à laver les carburateurs. Le monte-charge utilisé habituellement dans le garage était bloqué et, par conséquent, Peter Kempton devait effectuer le travail dans la cour. Quand le véhicule a pris feu, il est resté coincé sous le véhicule.
Voici les problèmes identifiés :

  • Un monte-charge n’a pas été utilisé.
  • Il n’y avait aucun antiretour pare-flammes entre le chalumeau soudeur et la source de carburant.
  • Il était impossible de s’échapper du véhicule en flammes à cause de l’excès de déchets.

Elie Hoyeck a nié sa responsabilité pour la mort de Peter Kempton, et, selon lui, Peter aurait dû savoir qu’il ne devait pas utiliser un chalumeau pour terminer le travail. Elie Hoyeck a été accusé de négligence criminelle causant la mort. C’était la première fois qu’un employeur faisait l’objet d’accusations aux termes de la Loi Westray en Nouvelle-Écosse.
La Cour a fait remarquer que le lieu de travail était dans un «état déplorable», qu’ »il y avait de nombreux problèmes de sécurité » et qu’on pouvait dire à juste titre qu’il s’agit ‘d’un accident qui devait se produire sur le site’. Cependant, la Cour a expliqué qu’elle devait se concentrer principalement sur les actions ou omissions de l’employeur qui ont causé la mort de Peter Kempton.

Il a été constaté que la méthode utilisée par Peter Kempton était dangereuse et qu’il était déraisonnable de s’attendre à ce qu’Elie Hoyeck, qui était un mécanicien inexpérimenté et un propriétaire d’entreprise, supervise ses mécaniciens qualifiés pendant tout leur travail. En acquittant Elie Hoyeck, la Cour a statué que la situation dans le lieu de travail témoignait d’une «insouciance déréglée ou téméraire à l’égard de la vie et de la sécurité d’autres personnes (et de sa propre vie et sa propre sécurité)», mais qu’on ne pouvait déterminer hors de tout doute raisonnable que les actions de Elie Hoyeck avaient causé la mort de Peter.

R c. Ressources Métanor, CQ, no 632-01-003393-149 (décision de 2017)

  • L’employeur a été reconnu non coupable relativement aux trois chefs d’accusation de négligence criminelle portés contre lui après que trois mineurs se sont noyés dans un puits de mine inondé.

Métanor Resources exploite une mine à Bachelor Lake (Québec). En novembre 2009, trois mineurs sont descendus à l’aide de la cage d’ascenseur dans un puits de mine la nuit afin de le réparer. Lorsqu’ils sont arrivés près du fond, le puits était rempli d’eau. L’eau s’y accumulait depuis 10 jours. Les sondes d’alarme des niveaux d’eau avaient été désactivées et le système de pompage était défectueux. Lorsque les responsables de l’entreprise ont fait remonter l’ascenseur parce qu’ils n’avaient pas de nouvelles des travailleurs, ils ont constaté que celui-ci était vide et que la trappe d’accès par le haut de la cage était ouverte. Quand les corps des mineurs ont subséquemment été récupérés, ils étaient complètement gelés.

En 2014, Métanor a fait l’objet de trois chefs d’accusation de négligence criminelle causant la mort. L’entreprise a plaidé non coupable, et a été reconnue non coupable, la Cour ayant confirmé que l’entreprise n’avait pas témoigné d’une insouciance déréglée ou téméraire.

R c. Gagné et Lemieux (2010)

En octobre 2006, un travailleur a perdu la vie et trois autres ont été blessés lorsqu’un train est entré en collision avec des véhicules d’entretien des voies. Simon Gagné et Steve Lemieux étaient les conducteurs du train au moment de l’accident et ils ont fait face à des accusations de négligence criminelle en raison de cet incident. Les deux employés ont été acquittés parce que leur comportement, même s’il était de toute évidence dangereux, ne s’éloignait pas de façon marquée des normes raisonnables, un des critères sous-tendant la négligence criminelle. Les actions des deux hommes reflétaient plutôt la «culture de tolérance» qui avait cours au sein de l’entreprise, Québec Cartier. Des preuves de ce fait comprenaient un manque de formation, l’omission d’obtenir les permis adéquats et l’utilisation de drogues.

R c. Ontario Power Generation, Tammadge et Bednarek (2006)

Au cours de l’été 2002, un groupe d’environ 20 personnes prenaient du soleil et se baignaient dans une région appelée High Falls, en aval du barrage des chutes Barrett. Lors de l’ouverture des vannes du barrage de la station d’Ontario Power Generation, un mur d’eau a déferlé. Une mère et son fils ont été emportés par les eaux et sont tombés d’une falaise de dix mètres et se sont noyés, et sept autres personnes ont subi des blessures. À ce moment-là, Robert Bednarek faisait fonctionner le barrage et John Tammadge était le directeur d’Ontario Power Generation («OPG») Ottawa/St. Lawrence Plant Group.
OPG, Robert Bednarek et John Tammadge ont fait face à deux accusations d’homicide et sept autres chefs d’accusation de négligence criminelle causant des lésions corporelles. La poursuite contre OPG a été la première à être rejetée. Pour condamner l’entreprise, il aurait fallu que toute allégation d’actes meurtriers soit le résultat de l’esprit directeur de l’entreprise, mais il n’y avait pas suffisamment de preuves à l’appui d’un cas contre les principaux dirigeants de l’entreprise. Les autres accusations portées contre Robert Bednarek et John Tammadge ont également été rejetées par la suite parce que le juge a statué qu’il s’agissait d’un seul incident dont le raisonnement était discutable. De plus, il a conclu que la restructuration du système d’électricité de l’Ontario à ce moment-là avait créé un «environnement chaotique au sein de l’entreprise» qui a “chamboulé” un système hydrographique antérieurement bien géré.

Résumé des causes – Accusations suspendues

R v. Peter Kiewit Sons ULC (2021)

  • Décès d’un travailleur causé par un gros rocher qui a dévalé une pente à un chantier et l’a écrasé. L’employeur et deux superviseurs ont été accusés de négligence criminelle causant la mort; les accusations ont été suspendues.

En février 2009, on avait ordonné à Sam Fitzpatrick et à d’autres employés de forer du roc à un endroit où une excavatrice effectuait des travaux directement au-dessus d’eux. Les excavatrices dégageaient des roches détachées au-dessus de l’endroit où Sam et les autres se trouvaient. Un gros bloc rocheux a dévalé la pente et frappé Sam Fitzpatrick, le tuant.

Le jour précédent, les activités de construction sur le chantier avaient été suspendues en raison d’un «quasi-accident», où une excavatrice avait délogé un rocher qui avait dévalé la pente. L’enquête a montré que l’excavation qui se déroulait au-dessus du chantier était la cause principale de l’éboulement. Le jour de la mort de Sam Fitzpatrick, les excavatrices fonctionnaient de nouveau au-dessus du chantier et, ce jour-là, l’entreprise avait noté qu’un autre rocher avait dévalé la pente et provoqué des dommages à l’équipement du site.

L’entreprise Peter Kiewit Sons ULC avait été condamnée à payer plusieurs amendes réglementaires et pour violations et, en 2019, l’entreprise et les deux superviseurs ont été accusés de négligence criminelle causant la mort aux termes du Code criminel.

Le procès était fixé au 7 septembre 2021. Cependant, une semaine avant celui-ci, le Service des poursuites de la Colombie-Britannique a suspendu les accusations parce que les souvenirs des témoins s’étaient considérablement effacés. Près de six ans s’étaient écoulés avant que la GRC ouvre une enquête et deux autres années et demie avant que la police fournisse à la Couronne toute la documentation dont elle avait besoin. Les contradictions dans les déclarations des témoins ont mené la Couronne à conclure que la cause ne répondait plus au seuil de «probabilité marquée d’obtenir le plaidoyer de culpabilité» nécessaire pour continuer les poursuites.

R c. Fournier, 2018 QCCQ 1071

Le 3 avril 2012, Gilles Lévesque travaillait au fond d’une tranchée et est décédé lorsque celle-ci s’est effondrée. La tranchée n’était pas soutenue et il y avait des amoncellements de sols de déblai des deux côtés à des distances non sécuritaires. Sylvain Fournier était l’employeur et a été accusé de négligence criminelle et d’homicide involontaire. En fin de compte, la Cour a reconnu Sylvain Fournier coupable d’homicide involontaire et suspendu l’accusation de négligence criminelle causant la mort en raison de la règle du double péril fondé sur les mêmes faits.

La Cour a condamné Sylvain Fournier à 18 mois d’emprisonnement et à deux ans de probation, et à payer une suramende compensatoire d’un montant inconnu.

Le Syndicat des Métallos c. Weyerhaeuser (2011)

Le 17 novembre 2004, on avait demandé à Lyle Hewer de nettoyer un broyeur à haute vitesse à une scierie. Le broyeur était souvent bloqué, et l’entreprise ordonnait aux travailleurs d’en dégager la pâte de papier et les débris. Le processus établi par l’entreprise pour nettoyer le broyeur exigeait que les travailleurs grimpent à l’intérieur d’un espace confiné pour enlever manuellement les déchets de bois et ainsi dégager les bourrages. Lyle Hewer s’est retrouvé coincé à l’intérieur sous la pile de débris et est mort asphyxié. La police a recommandé des accusations criminelles, mais la Couronne a refusé d’entamer des poursuites en raison du manque de preuves.

Par la suite, le Syndicat des Métallos a engagé des poursuites privées contre l’entreprise pour négligence criminelle causant la mort. Les trois jours d’audience ont eu lieu en octobre et en novembre 2010, où le syndicat a invité seize témoins à montrer qu’il existait suffisamment de preuves pour que Weyerhaeuser soit poursuivie aux termes des modifications Westray. Un juge de la Cour provinciale a ordonné l’instruction de la demande. Malheureusement, la Couronne de la C.-B. a pour politique de prendre en charge et de traiter elle-même toutes les poursuites privées. En août 2011, elle a décidé de suspendre les poursuites, statuant qu’il n’existait aucune preuve que la direction ait été au courant que des travailleurs allaient grimper dans l’espace confiné pour en dégager les débris.

Résumés des causes – Retraits d’accusations

R c. Chantiers Chibougamau (2018)

  • Un sous-traitant meurt après avoir fait une chute de neuf mètres; l’entreprise est accusée de négligence criminelle causant la mort.

En novembre 2013, Martial Larouche, un plombier sous-traité par Chantiers Chibougamau, une entreprise forestière, a fait une chute de neuf mètres alors qu’il travaillait dans un silo rempli de sciure de bois. Il est mort asphyxié. L’entreprise a été accusée de négligence criminelle causant la mort, et a plaidé non coupable.

Les chefs d’accusation ont été retirés en 2018 pour des raisons inconnues. Selon les médias qui ont couvert l’incident, Chantiers Chibougamau a payé une amende de 65 000 $, entrepris d’investir 200 000 $ sur trois ans dans la santé et la sécurité au sein de l’entreprise, et a fait don de 50 000 $ à chacun des enfants de la victime.

R c. Hritchuk, 2012 QCCS 4525

Mark Hritchuk gérait des installations d’entretien automobile. Le 10 février 2005, alors qu’ils étaient sous sa supervision, deux mécaniciens ont subi de graves brûlures alors qu’ils utilisaient une pompe à carburant fabriquée à la main pour effectuer le transfert de carburant. La pompe était brisée depuis quatre ans, mais les mécaniciens n’étaient pas au courant. Mark Hritchuk a été accusé de négligence criminelle causant des lésions corporelles en mai 2007. En échange d’un plaidoyer de culpabilité relativement à l’accusation d’avoir illégalement causé des lésions corporelles aux termes de l’article 269(a) du Code criminel, les accusations de négligence criminelle en vertu des modifications Westray ont été retirées.

R c. Millennium Crane (2011)

Le 16 avril 2009, une grue mobile appartenant à Millennium Crane Rentals est tombée dans un trou, écrasant le travailleur qui s’y trouvait. L’entreprise, qui appartient à David Brian Selvers, et le grutier, Anthony Vanderloo, ont été accusés de négligence criminelle causant la mort parce qu’ils avaient négligé de prendre des mesures raisonnables pour s’assurer que la grue était bien entretenue, qu’elle avait été inspectée et qu’elle était en bon état de fonctionnement. Par la suite, la Couronne a retiré les accusations après avoir déterminé qu’il y avait peu de chances raisonnables de condamnation. En particulier, les ingénieurs n’avaient pas été en mesure d’établir avec certitude si la capacité de freinage de la grue l’aurait empêchée de tomber dans le déblai.

R c. Peck (2011)

Diane Peck travaillait comme préposée aux bénéficiaires dans une maison de soins infirmiers. Elle a fait l’objet d’accusations à la suite du décès d’un résident de l’établissement, supposément en raison d’une chute qui serait survenue pendant qu’on le déplaçait sans l’aide d’un collègue ou l’utilisation d’un système de levage obligatoire. Pendant le déplacement, il a été présumé qu’on avait accidentellement laissé tomber le patient et qu’il avait subi une blessure. Diane Peck n’a pas signalé la blessure. Quand ses collègues se sont aperçus de la blessure que le patient avait à la jambe quelques jours plus tard, ils ont pris les dispositions pour que le client soit conduit à un hôpital de la localité. La blessure a été diagnostiquée comme étant une fracture du fémur et, une semaine plus tard, le client est décédé des complications de sa blessure à la jambe. La Couronne a retiré les accusations après avoir déterminé qu’il y avait peu de chances raisonnables de condamnation.

R c. Fantini (2005)

Domenico Fantini travaillait comme superviseur chez un petit entrepreneur en construction en Ontario. Il a été accusé de négligence criminelle causant la mort quand une tranchée s’est effondrée et qu’un travailleur sous sa supervision a été tué. En échange d’un plaidoyer de culpabilité relativement à trois violations aux termes de la Loi sur la santé et la sécurité au travail de l’Ontario et d’une amende de 50 000 $, la Couronne a retiré l’accusation de négligence criminelle.

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