Aux petites heures du matin du 9 mai 1992, une énorme explosion a ravagé la mine de charbon Westray dans le comté de Pictou (N.-É.). En quelques secondes, 26 mineurs ont perdu la vie. Il s’agit de l’une des pires tragédies survenues en milieu de travail au Canada depuis des générations.
De terribles dangers régnaient dans la mine, que les Métallos s’efforçaient de syndiquer à ce moment-là, a indiqué le juge K. Peter Richard, responsable de l’enquête sur ce désastre, dans son rapport L’histoire de Westray : Une tragédie prévisible.
L’enquête a mis à jour les actions et l’inaction de l’employeur, des organismes de réglementation et des gouvernements qui avaient rendu cet événement meurtrier inévitable. Elle a aussi révélé l’absence de voies légales pour réellement tenir les personnes criminellement responsables. Reconnaissant cette lacune, notre syndicat a lancé ce qui s’est avéré une campagne longue de dix ans visant à forcer le gouvernement à modifier le Code criminel du Canada afin d’autoriser des poursuites pénales dans des cas comme Westray.
Les modifications Westray adoptées à l’unanimité
Le 31 mars 2004, le projet de loi C-45, ou projet de loi Westray, a été adopté à l’unanimité par tous les députés à la Chambre des communes. La loi imposait de nouvelles obligations juridiques en santé et sécurité au travail aux employeurs et permettait de tenir les organisations, notamment les entreprises, leurs représentants et leurs dirigeants, criminellement responsables des décès et des blessures au travail.
«Bien que la Loi Westray ait constitué en elle-même une immense victoire, son application est devenue un nouveau champ d’action pour notre syndicat», affirme Marty Warren, directeur national des Métallos.
«Plus de 10 ans après l’adoption de la loi, les poursuites et les condamnations étaient peu nombreuses, c’est pourquoi notre syndicat a entrepris une nouvelle campagne pour mieux faire connaître la loi et faire valoir le besoin crucial de l’appliquer», poursuit-il.
«L’histoire de Westray en est une d’incompétence, de mauvaise gestion, de maladresses bureaucratiques, de tromperies,
de cruauté, de dissimulations, d’apathie, d’opportunisme et d’indifférence cynique».
– Juge K. Peter Richard, commissaire à l’enquête sur Westray
Notre campagne nationale, Mettons fin au carnage, Appliquons la loi, vise principalement les acteurs capables d’apporter des changements.
En particulier, la campagne cible tous les paliers de gouvernement, les organismes d’exécution de la loi
et les procureurs généraux et de la Couronne. Ses objectifs : assurer une formation plus approfondie à ces organismes et procureurs sur l’utilisation de la Loi Westray et la nomination d’agents de police et de procureurs spécialisés pour enquêter sur les accidents mortels en milieu de travail en cas de négligence grossière.
«Des progrès ont été réalisés, mais il reste beaucoup à faire quant à l’application de la loi dans les cas de décès et de blessures au travail. Il y a trop peu d’accusations criminelles, et encore moins de condamnations», fait valoir Dominic Lemieux, directeur québécois (District 5) des Métallos.
Vous tuez un travailleur, vous allez en prison
«L’histoire réelle soustendant Westray est la souffrance humaine infligée par les employeurs qui ne pensent qu’aux
“bénéfices” et qui semblent être prêts à accepter les accidents et les décès comme le prix à payer pour
faire des affaires», selon Scott Lunny, directeur du District 3.
«L’application appropriée de la Loi Westray pourrait grandement contribuer à montrer aux employeurs “qu’agir comme si de rien n’était” pourrait aboutir à l’emprisonnement d’un PDG», ajoute Myles Sullivan, directeur du District 6.
«Au Canada, chaque année, on compte 1000 décès reliés au travail, ainsi que des milliers de décès dus à des maladies professionnelles non dépistées et des centaines de milliers de blessures souvent invalidantes», poursuit Myles Sullivan.
Les travailleurs doivent retourner chez eux sains et saufs
En 1992, notre syndicat s’est engagé envers les familles, les amis et les collectivités des 26 mineurs de Westray. Nous avons juré de ne jamais abandonner nos efforts pour que les employeurs soient tenus responsables. On ne peut sacrifier
les travailleurs. Il faut faire davantage et veiller au respect des exigences fondamentales en santé et sécurité au travail.
Aujourd’hui, 30 ans après la tragédie de Westray, nous continuons d’honorer notre engagement à défendre le droit de tous les travailleurs et travailleuses de retourner chez eux en fin de journée sans blessure ni maladie.
En mai, des dirigeants et des membres de notre syndicat se rendront dans le comté de Pictou (N.-É.) à l’occasion
du 30e anniversaire de Westray afin de se joindre aux familles et à la collectivité, et de rendre hommage
aux mineurs qui ont été tués. «Leur étoile brillera toujours.»
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